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L'opposition canadienne et les PDG du pétrole appellent à l'abrogation du système fédéral de prix du carbone.

L'avenir du système de tarification du carbone instauré au Canada il y a six ans est incertain suite à la demande de sa suppression par 14 PDG du secteur pétrolier et gazier, ainsi que par le chef de l'opposition politique. L'éventuelle suppression de ce système, qui vise à réduire la pollution en incitant financièrement l'industrie à réduire ses émissions de carbone, remet en question la viabilité du projet phare Pathways Alliance de capture du carbone.

Le Canada fait face à un changement de priorités, alors que l'administration américaine, sous la présidence de Donald Trump, appelle à trouver de nouveaux marchés pour l'énergie. Ce climat politique a encouragé certains Canadiens à estimer que le pays a trop longtemps favorisé ses objectifs climatiques par rapport à l'économie.

Le leader conservateur Pierre Poilievre a récemment fait de ce système de tarification du carbone un enjeu électoral, promettant de l'abroger s'il gagne les élections. En place depuis 2019, ce système vise à réduire la pollution en fournissant des incitations financières à l'industrie lourde pour diminuer ses émissions de carbone. Poilievre a déclaré qu'il remplacerait les règles fédérales par des incitations fiscales élargies, laissant ensuite aux provinces le soin de décider de leur propre tarification du carbone.

Actuellement, les opérations industrielles dont les émissions dépassent un seuil autorisé doivent soit payer le gouvernement, soit acheter des crédits carbone pour compenser leur impact. Ce système est conçu pour devenir plus strict avec le temps, avec un tarif carbone qui augmente selon des intervalles spécifiés.

Le nouveau Premier ministre libéral, Mark Carney, qui devance légèrement Poilievre dans les sondages, a affirmé que le Canada avait besoin d'une tarification du carbone industriel pour accroître ses volumes commerciaux avec ses alliés. Par exemple, le Royaume-Uni prévoit d'appliquer des droits sur les produits importés de pays ayant des politiques climatiques moins strictes.

Dans une lettre ouverte cette semaine, 14 PDG d'entreprises canadiennes de pétrole et de gaz ont plaidé pour l'abrogation du schéma fédéral afin de permettre aux gouvernements provinciaux d'établir des réglementations carbonées mieux adaptées.

Le vendredi suivant, le Pathways Alliance, regroupant les six plus grands producteurs de sables bitumineux du Canada avec un projet de C$16 milliards visant à réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre de l'industrie, a également critiqué le système actuel, soulignant la nécessité de politiques fédérales favorables à l’expansion des sables bitumineux.

De nombreuses provinces, y compris l'Alberta, ont déjà leur propre système de tarification du carbone. Selon les règles actuelles, ces systèmes provinciaux doivent être aussi rigoureux que celui du gouvernement fédéral.

Les PDG soutiennent dans leur lettre que le schéma national place le Canada dans une position de désavantage concurrentiel par rapport aux juridictions qui n’en ont pas, comme les États-Unis. Cependant, de nombreux analystes estiment qu'un investissement d'entreprise à grande échelle dans la décarbonisation n'est pas viable sans l'incitation financière d'un prix sur les émissions.

Michael Bernstein, directeur général du think tank Clean Prosperity, a déclaré qu'en l'absence de clarté sur l'avenir de la politique, il est peu probable que l'investissement dans Pathways se concrétise.

L'industrie des sables bitumineux est le secteur le plus polluant du Canada, et le projet proposé par Pathways serait l'un des plus grands développements de capture et de stockage du carbone au monde, s'il se concrétise. Pathways a déposé des demandes réglementaires pour un pipeline destiné au transport de carbone en mars dernier, mais n'a pas encore pris de décision définitive sur le projet.

Cinq des six entreprises membres de l'Alliance - Canadian Natural Resources, Suncor Energy, Imperial Oil, Cenovus Energy et MEG Energy - ont signé la lettre appelant à l'abrogation du prix industriel du carbone, mais ces entreprises n’ont pas répondu aux demandes de commentaire. Le sixième membre, ConocoPhillips Canada, n'a pas signé la lettre, précisant par voie électronique que son engagement envers Pathways reste inchangé.

Parmi les signataires figuraient également les PDG d'ARC Resources, Veren, Pembina Pipeline, Enbridge, Whitecap Resources, TC Energy, Tourmaline Oil, Strathcona Resources et South Bow Corp.

Dans une interview accordée ce mois-ci, le PDG de Canadian Natural Resources a reconnu les défis liés à l'élection imminente et à l'incertitude concernant l'avenir des politiques énergétiques et climatiques, indiquant que les discussions sur Pathways avaient ralenti en raison de l'administration américaine.

Ces derniers mois, Pathways a négocié avec le gouvernement fédéral pour offrir un soutien face au prix du carbone industriel, espérant se prémunir contre un éventuel retrait de la tarification carbone par un futur gouvernement.

Aucune entente n'a encore été conclue. Un système de tarification du carbone affaibli laisserait peu de moyens aux gouvernements pour encourager des projets comme celui de Pathways, hormis par le biais de subventions directes, a souligné Chris Severson-Baker, directeur exécutif du Pembina Institute.