Un réalisateur français a été reconnu coupable d'agression sexuelle sur l'actrice Adèle Haenel lorsqu'elle était mineure.
Christophe Ruggia, 60 ans, a été condamné à quatre ans de prison, dont deux avec sursis. Il passera deux ans en résidence surveillée, période pendant laquelle il devra porter un bracelet électronique.
En plus de la condamnation, Ruggia a été condamné à verser 15 000 euros à Haenel en compensation, ainsi que 20 000 euros pour les années de thérapie psychologique qu'elle a suivies suite aux abus.
Le président du tribunal a déclaré que Ruggia avait "abusé" de son influence sur Haenel, qui avait entre 12 et 15 ans au moment des agressions.
L'avocate de Ruggia, Fanny Collin, a déclaré qu'il ferait appel de la sentence.
Haenel, aujourd'hui âgée de 35 ans, a été applaudie par des militantes des droits des femmes en sortant du tribunal à Paris, comme cela avait été le cas lors des phases précédentes du procès.
Des reporters présents au tribunal lundi ont témoigné de son apparente nervosité avant le verdict, mais Haenel n'a montré aucune réaction en entendant la condamnation de Ruggia.
Haenel a affirmé que Ruggia avait commencé à la harceler lors du tournage de son film de 2002, Les Diables, quand elle avait 12 ans, ce qu'il a nié.
Le film raconte l'histoire incestueuse d'une relation entre un garçon et sa sœur autiste et comporte des scènes de sexe impliquant des enfants, dont des plans rapprochés du corps nu de Haenel.
Avant le procès, les enquêteurs avaient interrogé des membres de l'équipe du film qui leur avaient fait part de leur malaise face au comportement de Ruggia sur le plateau.
Un résumé des accusations cité par les médias français indique que Ruggia et Haenel se voyaient chaque samedi après la fin du tournage du film, "sous couvert de leçons de cinéma" au cours desquelles Ruggia aurait touché sexuellement Haenel et mis les mains dans ses sous-vêtements.
Lors d'entretiens avec les médias français, Haenel a également déclaré qu'elle avait été contrôlée et manipulée par Ruggia lorsqu'elle était enfant et que personne ne l'avait protégée lorsqu'on lui demandait de faire des choses au nom de l'art.
Au tribunal fin de l'année dernière, Ruggia a nié les accusations, arguant qu'il avait simplement essayé de "protéger" Haenel au début de sa notoriété.
Les enquêteurs ont également déclaré avoir trouvé des notes sur l'ordinateur de Ruggia dans lesquelles il évoquait la "sensualité débordante" de la jeune Haenel.
Ruggia a dit que Haenel avait été "radicalisée" et qu'il pensait être devenu le bouc émissaire du mouvement #MeToo en France.
Ses commentaires ont finalement poussé Haenel à lui crier de "la fermer" avant de quitter le tribunal en plein milieu du procès en décembre dernier.
Haenel a joué dans le film acclamé de 2019 Portrait de la jeune fille en feu.
La même année, elle a accordé une longue et émouvante interview à Mediapart dans laquelle elle a détaillé ce qu'elle a qualifié de "harcèlement sexuel" subi de la part de Ruggia.
Elle a déclaré avoir décidé de parler de ses abus présumés après avoir regardé le documentaire Laissez-moi danser, qui explorait les relations du chanteur Michael Jackson avec des enfants.
Cela m'a fait réaliser que j'avais trop longtemps adhéré à la version de Ruggia, que tout cela avait été une histoire d'amour", a-t-elle dit, ajoutant que cela lui a permis de comprendre les mécanismes de "contrôle et de fascination.
Haenel a quitté l'industrie cinématographique française en 2023 pour protester contre ce qu'elle a appelé sa "complaisance" envers les prédateurs sexuels.
Depuis, l'acteur Gérard Depardieu a été accusé de viol et devrait être jugé le mois prochain. Les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon ont également été accusés de viol et d'agressions sexuelles par l'actrice Judith Godrèche.
Le réalisateur Céline Sciamma, ex-compagne de Haenel et réalisatrice de Portrait de la jeune fille en feu, ainsi que Godrèche étaient présents dans la salle d'audience pour entendre le verdict lundi.