LONDRES, 6 mars (Reuters) - Les États-Unis prévoient d'imposer des frais d'amarrage dans les ports américains à tout navire faisant partie d'une flotte comprenant des navires construits ou battant pavillon chinois, et pousseront les alliés à adopter des mesures similaires sous peine de représailles, indique un projet de décret exécutif.
L'administration du Président américain élabore ce décret dans le but de relancer la construction navale nationale et affaiblir l'emprise de la Chine sur l'industrie maritime mondiale.
La montée en puissance de la Chine en mer et le déclin de la préparation navale américaine font rarement l'objet d'un consensus entre les législateurs républicains et démocrates américains.
Les chantiers navals chinois représentent plus de 50 % de la capacité de transport maritime produite chaque année dans le monde, contre seulement 5 % en 1999, selon le Center for Strategic and International Studies.
Cette croissance s'est faite au détriment des chantiers navals japonais et sud-coréens. La construction navale américaine a atteint son apogée dans les années 1970 et ne représente plus qu'une infime partie de la production industrielle.
Le projet de décret exécutif, daté du 27 février et examiné par Reuters jeudi, propose d'imposer des frais sur tout navire entrant dans un port américain, "peu importe où il a été construit ou immatriculé, s'il fait partie d'une flotte comprenant des navires construits ou immatriculés en RPC (République populaire de Chine)".
Les autorités américaines et chinoises n'ont pas pu être immédiatement contactées pour commenter.
Le document s'appuie sur le bureau du Représentant américain au commerce pour imposer des frais pouvant aller jusqu'à 1,5 million de dollars sur les navires construits en Chine entrant dans les ports américains après une enquête sur la domination croissante de la Chine dans les secteurs mondiaux de la construction navale, des transports maritimes et de la logistique.
Une différence clé est que le projet de décret exécutif ne reprend pas le langage de l'USTR précisant que les frais portuaires sur les flottes seraient imposés lorsque les navires construits en Chine représentent 25 % ou plus des navires en opération, en commande ou en attente.
Il ne fixe pas non plus de montant en dollars pour ces frais ni ne précise comment ils seraient calculés.
Le plan pourrait entraîner des coûts significatifs pour les grandes compagnies de transport de conteneurs, y compris COSCO de Chine, MSC de Suisse, Maersk du Danemark et Evergreen Marine de Taïwan, ainsi que pour les exploitants de navires transportant des denrées alimentaires en vrac, du carburant et des automobiles.
Le PDG de MSC, Soren Toft, a déclaré en début de semaine que la plus grande compagnie maritime de conteneurs au monde pourrait visiter moins de ports américains pour limiter son exposition aux nouveaux frais.
Le projet de décret exécutif appelle également les autorités américaines à inciter les alliés et partenaires à adopter des mesures similaires ou à risquer des représailles.
Les États-Unis imposeraient également des tarifs sur l'équipement de manutention de marchandises chinois, selon le projet de décret.
"La sécurité nationale et la prospérité économique des États-Unis sont davantage menacées par les pratiques commerciales déloyales de la République populaire de Chine dans les secteurs maritimes, logistiques et de construction navale", indique le projet de décret.
Reuters avait rapporté mercredi des frais sur les importations arrivant sur des navires fabriqués en Chine à partir d'un projet de fiche informative du décret en 18 points.
La compagnie maritime française CMA CGM a déclaré jeudi qu'elle consacrerait les quatre prochaines années à étendre sa flotte de American President Lines de 10 à 30 navires.
CMA CGM est la troisième plus grande compagnie maritime de conteneurs au monde et fait partie d'une alliance de partage de navires avec des entreprises, y compris COSCO. Elle compte le détaillant mondial Walmart parmi ses principaux clients et a déclaré la semaine dernière que le projet de taxe portuaire américaine sur les navires construits en Chine affecterait toutes les compagnies maritimes.