MEXICO, 27 février (Reuters) - Le Mexique a remis jeudi aux autorités américaines des figures importantes du monde criminel du pays, dans le cadre d'une extradition surprise de près de 30 détenus ou autres accusés d'avoir des liens avec des cartels de la drogue violents.
Certains sont des chefs de gangs vieillissants qui régnaient il y a des décennies sur des réseaux internationaux de trafic axés sur la cocaïne et l'héroïne. D'autres sont des chefs plus jeunes impliqués dans le transport de grandes quantités de fentanyl mortel aux États-Unis plus récemment.
Les autorités mexicaines ont confirmé avoir remis 29 membres de cartels aux États-Unis. Cette décision fait suite aux menaces continues du président américain Donald Trump d'imposer des tarifs douaniers généralisés sur les produits mexicains, ce qui devrait intervenir le 4 mars.
Reuters avait signalé l'extradition inhabituelle, la plus importante du Mexique depuis des années, avant que les gouvernements américain et mexicain ne l'annoncent.
Pamela Bondi, procureure générale des États-Unis, a confirmé dans un communiqué écrit que les 29 accusés avaient été placés en détention aux États-Unis.
Au moins deux des accusés, dont Rafael Caro Quintero, soupçonné d'avoir été parmi les responsables du meurtre en 1985 d'un agent anti-narcotiques américain, seront présentés devant un tribunal fédéral de Brooklyn vendredi, selon une source proche du dossier.
Ont également été remis des narcos plus récents tels que Antonio Oseguera Cervantes, frère du chef de cartel le plus recherché du Mexique, Nemesio Oseguera Cervantes, à la tête du puissant cartel de la Nouvelle Génération de Jalisco.
Les autorités américaines offrent une récompense de 15 millions de dollars pour toute information menant à l'arrestation de Nemesio, surnommé "El Mencho".
Les autorités américaines affirment que le CJNG est l'un des deux principaux cartels mexicains, avec le tristement célèbre cartel de Sinaloa, responsables de l'introduction de fentanyl dans les rues américaines ces dernières années.
Une figure de haut rang au sein de l'aile du cartel de Sinaloa dirigée par les fils de Joaquin "El Chapo" Guzman Loera, José Angel "El Guerito" Canobbio, a également été remis.
L'extradition de masse marque une escalade significative par rapport aux années précédentes.
Entre 2019 et 2023, le Mexique a extradé en moyenne environ 65 suspects criminels recherchés chaque année vers son voisin du nord, selon des données fournies par un responsable américain.
Caro Quintero a été transféré à New York, où il a été inculpé pour trafic de drogue.
Ce co-fondateur du cartel de Guadalajara, jadis l'un des groupes de narcotrafiquants les plus puissants d'Amérique latine, a passé 28 ans en prison pour le meurtre brutal et la torture de l'ancien agent de la DEA Enrique "Kiki" Camarena, l'un des meurtres les plus notoires des guerres sanglantes des narcotrafiquants au Mexique.
Les trafiquants présumés ont été envoyés vers huit destinations à travers les États-Unis, dont Phoenix, Chicago, Houston et Washington, a indiqué le Mexique.
L'extradition de Caro Quintero signifie que "le message est clair - nous n'oublierons jamais si vous vous en prenez à l'un de nos agents", a déclaré un ancien responsable américain informé de l'opération.
Caro Quintero a nié toute implication dans le meurtre de Camarena. Il avait été libéré en 2013 pour vice de forme par un juge mexicain et était retourné au trafic avant d'être arrêté par les autorités mexicaines en 2022.
Certains analystes voient les extraditions comme un cadeau à Trump avant des négociations commerciales cruciales. Le président américain a déclaré qu'il imposerait des tarifs douaniers de 25 % sur tous les produits mexicains en raison de ce que son administration considère comme une réduction des décès par fentanyl et des flux migratoires.
Ces droits représenteraient un coup économique majeur pour l'économie mexicaine dépendante du commerce, qui exporte 80 % de ses produits vers les États-Unis.
Des responsables mexicains de haut niveau étaient à Washington jeudi pour des réunions visant à éviter les tarifs, le Mexique indiquant que des mesures de sécurité avaient été convenues pour les prochaines semaines afin de lutter contre le trafic de fentanyl et d'armes, cette dernière étant une demande clé du Mexique.
Une source américaine au fait du dossier a déclaré que l'extradition de masse était un signe de "bonne foi" de la part du gouvernement mexicain.
Il n'était pas immédiatement clair si les autorités mexicaines avaient suivi les procédures formelles d'extradition ou si elles avaient choisi de contourner toute condition légale ou diplomatique.
Dans sa déclaration confirmant le transfert, le gouvernement mexicain a simplement qualifié le mouvement de "transfert".
Deux anciens chefs présumés du gang ultra-violent des Zetas figuraient également dans le groupe - Miguel Ángel Treviño Morales, surnommé Z-40, et Óscar Omar Treviño Morales, surnommé Z-42.
Ils sont connus pour avoir été des pionniers de tactiques particulièrement sanglantes dans les guerres contre la drogue de longue date au Mexique, telles que la dissolution de rivaux dans l'acide, et ont tous deux été arrêtés il y a plus d'une décennie par des soldats mexicains.
L'avocat des Treviño, Juan Manuel Delgado, a déclaré à Reuters qu'il n'avait pas été officiellement informé de leur départ du pays.